Euthanasie, besoin d'en parler. arthrose.
Posté le 22/08/2015 à 17h13
honey54
Posté le 22/08/2015 à 17h13
Bonjour Ca,
Je viens vous parler de ma jument, Elsa, ma petite jument parmi tant d'autre. J’aimerais des témoignages, des expériences, des avis, pour m'accompagner, me raisonner, m'aider, ou juste m'écouter et me comprendre, ou pas.
Elsa, une TF que j'ai acquis alors qu'elle en avait déjà 16 ans, elle en a 23 maintenant.
En couleur, ci-dessous, l'histoire d'Elsa, et la mienne forcément un peu. Beaucoup de blabla, pour mieux comprendre comment on est là aujourd'hui, mais pas non plus primordiale pour comprendre mon problème, donc les plus pressés pourront zapper.
Elsa n'a jamais fait de courses. A la place ce sera du cso, pas à haut niveau, mais assez pour la bousiller. Je ne connais pas exactement le début de sa vie, car elle a changé plusieurs fois de propriétaires. Elsa était en club, cheval de propriétaire parfois, dp de club d'autre fois. Je ne sais pas quel âge avait Elsa quand ses avant-avant derniers propriétaires l'on achetée.
Mais oui Elsa avait déjà été diagnostiquée pour de l'arthrose. Oui elle avait une ferrure orthopédique ultra compensée. Oui elle aimait bien le cso, et non son arthrose (importante) n'était pas une raison suffisante pour arrêter les concours, tout comme sa tendinite n'avait pas été une raison suffisante d'annuler Lamotte, où elle s'était d'ailleurs bien classée malgré tout. Car oui Elsa cache bien sa douleur, et Elsa a un grand cœur, elle donne beaucoup pour son cavalier. L'âge avançant, et l'arthrose s'aggravant, Elsa ne permettait plus à sa toute jeune propriétaire de réaliser ses rêves de concours. Cheval kleenex, usagé. Elle est revendue à des personnes du même club, en tant que jument capable de continuer les concours, le cso, etc.
Cette fois Elsa tombe chez des gens qui aiment les chevaux. Ils s'aperçoivent vite que oui elle souffre de son mode de vie, de ce qu'on lui demande, alors ils veulent l'éloigner. L'éloigner des terrains de concours, l'éloigner des barres d'obstacles, l'éloigner des cours en clubs, l'éloigner des traitements qui servent à masquer sa douleur pour se déculpabiliser, l'éloigner de ce qu'a été sa vie jusqu'alors. Alors même s'ils l'on achetée bien plus chère à peine quelques mois plus tôt, ils cherchent à la vendre le prix de la boucherie avec son matériel, pourvus que quelqu'un leur garantisse tout ça.
Cette personne c'est moi, enfin, mes parents, à "l'époque". J'avais 16 ans, et mes parents m'avaient offert mon premier cheval, un an et demi plus tôt. Honey, la réalisation d'un rêve. Honey était chez moi, dans des près dans mon village, avec pour compagnie le cheval d'un voisin. Un jour, je reçois un appel de l'ancienne propriétaire de Honey, elle a une amie qui cherche une nouvelle famille pour sa trotteuse, alors elle a pensé à moi, à nous. Elle me laisse les coordonnées de la propriétaire de la trotteuse, même si je viens de lui dire que non, je ne suis pas vraiment intéressée. Pas vraiment. Et mes parents encore moins.
Je suis en seconde, et j'ai déjà un cheval à gérer, il n'est pas en pension, c'est moi qui gère tout, de l'entretient des parcs, au rdv véto, la surveillance quotidienne, car si ma mère est aussi cavalière, mon père pas du tout, et ils m'ont bien prévenu que si je voulais un cheval, ils pouvaient réaliser mon rêve financièrement, mais le reste ce serait moi, le temps, la responsabilité. Alors non, je n'ai pas vraiment envie d'un deuxième cheval, je n'y ai même jamais pensé. Et puis j'aime bien les chevaux de couleur, si honey n'est pas apaloosa dans les papiers, elle l'est dans la robe, et ça me plait. Je n'ai jamais aimé les chevaux alezan ou bai. Et puis les trotteurs, j'ai toujours trouvé cela "pas terrible", question de goût personnel. Et puis je suis une cavalière d'extérieur, Honey a une vie 100% pâture entrecoupée de balades, randos, ou travail à pieds, j'aime les chevaux rustique, au pieds sûr et passe partout. Donc une trotteuse bai de 16 ans, bof.
Bof mais je garde les coordonnées quand même. Bof mais je regarde sur le net des photos de trotteurs, ce n'est pas si moche après tout. Et puis bai, c'est toujours mieux que alezan. Et si mon voisin venait à partir et que Honey se retrouve seule ? Ce serait mieux d'avoir deux chevaux, " au cas où". Surtout que trois c'est mieux que deux, ce n'est pas encore une horde c'est vrai, mais c'est mieux que deux. On pourrait faire des balades à trois. Et puis après tout ... ca ne coute rien d'aller la voir, si ?
C'est comme cela que je me retrouve dans la voiture, avec mes parents, ma bombe dans les mains, sur le parking de la pension d’Elsa. Je ne suis pas excitée comme je l'étais lors de la visite pour Honey. J'ai un peu honte même, j'ai l'impression d'être une morveuse capricieuse. J’ai déjà la chance d’avoir mon propre cheval à mon âge, j’en suis infiniment reconnaissante. Alors demander un deuxième cela me parait déplacé, pas mérité. Mais mes parents ont l’air vraiment intéressés, pas juste pour me faire plaisir. Et puis, ca ne coûte rien d’aller la voir. Alors on y est allé.
On m’amène devant Elsa. Elle est dans son box, sage. Le box est ouvert, et une simple chaine l’empêche de sortir de cette boîte où elle passe le plus clair de son temps, ce détail me laisse perplexe sur le coup. Elsa est tondue, sous sa couverture, sa crinière est niquelle, coupée court. Je pense à Honey, pleine de boue, la crinière en vrac, à ses protestations quand je l’enferme au box les froides nuits d’hiver (-15 tout de même des fois, maintenant j’ai des abris dans les près c’est mieux).
On la sort du box, et on ne me laisse pas vraiment la préparer, pour aller plus vite. Et puis on me dis qu’elle est nerveuse. Pendant que le fils la selle, la mère me parle d’Elsa. Elsa, une gentille jument, mais pas vraiment affectueuse, pas proche de l’humain, indifférente. Elsa, une jument nerveuse qui embarque presque toujours en balade, dit-elle en me montrant le filet releveur que son fils lui met, il faut bien cela pour Elsa. Elsa une jument très brave et avec beaucoup d’énergie malgré son âge. Le père l’appelle « grand-mère », et au fond de moi je pense qu’un cheval bien entretenu peut vivre facilement plus de 30 ans, et qu’elle en est donc seulement à la moitié de sa vie (si seulement elle avait été bien entretenue). Une fois prête il faut la faire marcher, à cause de son arthrose (j’ai envie de dire que même sans arthrose on devrait toujours marcher un peu un cheval enfermé au box avant de monter dessus, mais pour Elsa c’est encore plus important.). On ne me laisse pas le faire car elle est « chaude ». Du coup je l’observe, pleine d’énergie, un peu nerveuse, mais très respectueuse.
Direction la carrière, mais je ne peux toujours pas monter dessus. Quelqu’un d’autre doit la monter avant moi (le fils il me semble) pour faire son échauffement. Son échauffement inversé je devrais dire, puisque sous les conseils du coach, il consiste a systématiquement commencer une reprise par des tours aux galops à chaque mains (sans jamais passer par la pas ou le trot, mais bien arrêt=>galop). C’est bon pour son arthrose m’explique-t-on, sinon elle boite, et si je la prends ce serait bien que je fasse la même chose chez moi. J’acquiesce mais je me sens de plus en plus mal. Je suis montée en club de mes 5ans et demi (oui c’est important le demi à cet âge-là) à mes 13 ans, et je n’ai pas remis les pieds dans un manège ou une carrière depuis plus de 2 ans, j’en avais même oublié la sensation de marcher dans le sable. Il y a du monde pour nous regarder. Et je ne me sens pas à ma place, pas à la hauteur, j’ai envie de rentrer chez moi, mais ce serait stupide et irrespectueux. Alors quand enfin Elsa s’arrête essoufflée devant moi, je grimpe avec appréhension mais aussi curieusement avec empressement sur son dos.
Cette petite jument qui « ne paie pas de mine » a un vrai moteur sous le capot, aucun problème d’engagement. Je l’effleure des mollets et je sens la tension monter. Elle est très vive, très sensible, mais très à l’écoute, je me sens en confiance directement. Au sol je vois quelques regards inquiets, peur que je me fasse embarquer. Mais je la sens très bien, elle connait son boulot, et quand je fais des voltes, je sens qu’elle aimerait que j’agrandisse mon cercle pour la mettre dans la trajectoire de cet obstacle, planté au milieu, qui semble l’appeler.
La suite se passa très vite, et le temps de dire ouf Elsa était là, chez moi. Ce fut difficile au début pour le fils qui y été beaucoup attaché, et pour qui Elsa compté énormément. Même si bien sûr ils sont reparti avec la certitude qu’ils seraient les bienvenu s’ils voulaient venir voir Elsa dans le future, on sait tous comment cela se fini bien souvent, le temps et la vie passent, et ce garçon ne revint jamais voir son Elsa.
La suite cette histoire dure 7 ans et se poursuis encore aujourd’hui. Honey eu un coup de foudre pour Elsa et délaissa le cheval du voisin avec qui elle s’entendait plutôt bien du jour au lendemain. Elsa que l’on m’avait décrite comme « pas vraiment affectueuse », s’est révélée être une vraie calinette bien plus proche de moi que ma grosse morue (honey, que j’aime de tout mon cœur quand même, mais qui m’échangerai sans problème contre une carotte). Elsa est douce et gentille, tellement gentille (encore une fois contrairement à Honey, qui a un sale caractère et fait même peur au taureau quand bovin et équin font pâture commune parfois (véridique, elle l’a déjà mordu)).
Elsa est toujours volontaire et de ‘bonne humeur’, elle est tolérante et me passe toutes mes erreurs toutes mes impatiences (là où honey profite de chaque brèche pour prendre le dessus lol). Je ne me suis finalement jamais faite embarquée en balade, passé la première semaine au près elle est devenue très calme en balade et était très facile à redescendre en pression, jusqu’à finalement ne même plus monter dans les tours. Elle est devenue zen, relaxe, bien dans ses sabots incroyablement vite.
Forcément passé d’une vie au box à une vie au près demanda quelques ajustement, dont une grosse couverture pour elle l’hiver alors que Honey n’a rien. Nous n’avons fait que de la balade tranquille, quelque croisillons de temps en temps plus pour elle que pour moi (c’est qu’elle aimait vraiment sauter) , les vétérinaires, maréchales, ostéos m’ont tous conseillé de continuer à la monter assez régulièrement pour son arthrose, favoriser le mouvement, sans trop pousser non plus, trouver le juste milieu. Autrement dit, avoir toujours peur de trop faire, ou pas assez.
Depuis le cheval du voisin est parti ailleurs, et mes deux juments ont gagnées une nouvelle copine, Dylana arrivée en décembre dernier à 1,5 ans, et les trois s’entendent très bien.
Dès qu’Elsa est arrivée chez moi elle a bénéficiée des trucs habituels pour l’arthrose, du vinaigre de cidre, de l’harpago, en cure, plus ou moins longue, de la poudre calcique. Les radios régulières nous montraient que l’arthrose continuait sa progression, inlassablement, impitoyablement. Les vétos (deux se sont succédés) n’avaient jamais vu autant d’arthrose. Ses deux carpes sont complètement déformés. Les radios sont même envoyés au cirale, c’est un peu un cas « d’école ».
Chaque jour pire que la veille. Elsa n’est plus du tout montée depuis plus de deux ans. Il y a encore un an, je la prenais en balade en liberté derrière Honey (elle suit comme un toutou) mais maintenant ses trajets se limite au changement de près, ca me fait trop mal de la voir marcher.
Il y a 3 ans Elsa a eu une première perf de tildren, vraiment efficace pendant bien 10 mois (on continuait l’harpago, vinaigre etc à côté). Du coup l’année d’après, nouvelle perf de tildren. Cette fois efficace à peine un ou deux mois. Nous avons essayé les infiltrations, le problème c’est que les point d’accès sont bouchés par des suros, du coup impossible d’injectées du produit dans toutes les synoviales concernées. Ce fut un échec.
Aujourd’hui, elle boite en permanence, et la seule chose qui la soulage c’est son equipalazone quazi quotidien. C’est devenu dur de la parer, c’est un crève cœur à chaque fois de voir comme cela lui fait mal de donner les pieds longtemps. Impossible de prendre les pieds en flexions, elle n’est plus parée que par devant.
En dehors de cela, la véto me dit souvent qu’elle a un cœur de jeune fille, elle a l’œil vif, et ne manque pas d’appétit. Elle joue plus souvent avec Dylana que Honey, quand on les change de près c’est la première à faire la folle dans l’herbe bien verte, alors que les deux autres collent directement leur nez dans l’herbe. Elle ne s’isole pas, et suis toujours les autres. Quand je prends Honey et Dylana (pour bosser pour l’une, pour faire du dextre ou balade à pieds seule pour l’autre.), Elsa hennit et « creuse un fossée » à force d’aller-retour devant la porte du parc.
Mais parfois, je vois qu’elle a vraiment mal. Avec ma véto on avait bon espoir que ca se soude, ce qui fait que oui elle boiterais toujours, mais au moins cela ne serait plus douloureux. Car là aux dernières radios on voit qu’il y a encore du remaniement osseux, ce n’est toujours pas stabilisé.
Mon ancien véto me parlait euthanasie, j’en ai changé. Mon ostéo change d’avis une fois sur deux. Ma véto actuel a bon espoir que l’articulation se soude et qu’Elsa continue sa petite vie tranquille sans trop souffrir (elle ne gagne rien à ne pas me conseiller l’euthanasie, puisque elle me fait des ordonnances pour l’equipalazone que j’achète sur internet en grosse quantité trois fois moins chère que chez elle, en fait je ne lui achète rien pour l’arthrose d’Elsa, vu que l’on a arrêté le tildren, et les infiltrations, bref ses conseils sont totalement désintéressée. Mon mf qui il y a encore un an me soutenais, me reproche aujourd’hui de ne pas l’avoir euthanasié. Alors est-ce que je suis égoïste ? Est-ce que je suis un monstre ? Je sais que toute les euthanasies sont dures, mais suite à une colique ou une fracture avec de très mauvais pronostique de guérison, le choix me parait plus évident, le cheval va soudainement mal, très très mal, alors on vient le soulager.
Elsa vit avec ses douleurs depuis des années, sur la longueur on voit bien que cela empire, mais d’un jour à l’autre pas franchement, et il y a parfois du mieux. Alors comment ? Comment je peux me décider qu’un jour ca va assez bien pour lui laisser le droit de vivre, mais que un autre jour c’est trop, et qu’il faut abréger ses souffrances ? Ai-je même le droit, en fait ? Est-ce que quand je serais vieille boiteuse avec une canne je voudrais en finir avec la vie ? Peut être que oui. Peut être que non.
Parfois quand je la regarde je crois voir qu’elle est heureuse, qu’elle veut vivre malgré sa douleur. Qu’elle apprécie de flâner au soleil, manger les feuilles sur cette branche un peu basse, rappeler Dylana à l’ordre car malgrès tout elle la domine encore, saluer les chevaux de passage en balade sur la route d’un hennissement joyeux, frotter sa tête sur une Honey bienveillante..
Et d’autre fois, je me dis que je vois ce qui m’arrange, et que je suis horrible, je pleure quand je la vois boiter, et je pleure d’imaginer qu’elle parte autrement que de vieillesse.
Ma douche Elsa. Entre sagesse, égoïsme et indécision je me sens perdue, et seule. Si seulement elle savait parler, ou si seulement je savais l’écouter.
Je suis désolé du roman. Je pense que j'ai un problème pour synthétiser, surtout pour parler des mes chevaux.
Est-ce que des personnes vivent ou, on vécu ce que je vis ?