@agentmulder a aucun moment je n'ai minimise l'état d'usure dans lequel le métier place les agents. Qui peuvent être de très bons profs en effet. On n'est pas responsable de l'état d'usure, du processus d'usure, mais on est responsable de rester dans une situation qui nous use. Pas forcément individuellement, j'accuse personne, tout le monde devrait être en état psy de se dire mince je peux pas aller bosser toute ma vie la boule au ventre, il faut actionner un ou plusieurs leviers. Parce que c'est comme ça que ça commence. Je ne reproche a personne d'en arriver a un tel état de nerfs, je dis qu'on ne devrait plus aller bosser au stade encore avant cet état de nerfs, déjà.
Pas de mode d'emploi IKEA non plus, en fait. Un problème, une solution, avec l'environnement et les moyens immédiats. Ça ne plaît pas a tout le monde mais je fonctionne comme ça et c'est fou ce qu'il est possible de faire quand il faut vraiment faire les choses. C'est pas comme si j'avais jamais vu ça se faire, donc c'est possible (cas inverse d'ailleurs, une enseignante frappée par un élève, pour ne citer qu'une seule situation aussi proche que possible). Et par ailleurs je ne vois pas l'intérêt de vouloir véhiculer l'idée que ce n'est pas faisable (surtout quand ca l'est). Je vois pas trop l'intérêt non plus de jouer la carte de nan mais tu enseignes pas depuis assez longtemps / tu te rends pas compte. En fait ça ressemble juste a un essai de se convaincre que si si c'est logique d'en arriver là et y a des excuses. Comme quand la copine qui se veut défenderesse des chevaux essaie de me vendre que si si faut quand même un peu monter la jument sinon elle est malheureuse. Ma version ne lui va pas alors elle en invente une ou la sienne est réglo.
Les métiers de l'enseignement sont difficiles. Il n'y a personne qui dira le contraire. Personne non plus n'irait reprocher a qqn de ne plus le supporter. Ce serait peut être même une idée tiens de limiter le temps d'activité en classe dans une carrière de prof, on pourrait repenser totalement le métier. Ce que je dis, c'est que c'est pas une raison. Car ça c'est comme tous les autres métiers en fait, tu peux te retrouver complètement repoussé dans tes retranchements, malmené, etc, c'est pas propre aux profs ça, ce qui est propre a certaines professions comme prof, c'est d'avoir un public dépendant et en infériorité symbolique en face de lui. Donc imaginons j'ai pas assez enseigne pour vous, ai je été assez animatrice ? Ai-je assez berce de nouveaux nés pour dire que bord d'aile de merle, on DOIT savoir désamorcer une situation avant l'impardonnable en dernier recours, c'est indiscutable! mais avant ça on devrait aussi tous être capables de reconnaître qu'on prend un mauvais chemin / qu'on s'approche du bord de la falaise ! Rappelons qu'on parle de gens dont c'est le METIER d'être au contact d'enfants ! Ça fait partie de la vigilance qu'on doit avoir dans la réflexion sur sa pratique.
Et ça c'est pas tant un truc de prof (encore que, l'image du métier avec la réputation d'absentéisme, la conscience pro, pas vouloir laisser tomber ses élèves etc c'est quand même très présent) qu'un truc sociétal parce que c'est juste mal vu de prendre soin de soi de cette façon, combien diraient qu'un arrêt de 2 semaines pour surmenage serait des vacances alors que c'est peut être cet arrêt qui permettrait justement de faire le point, de redevenir un peu soi même et trouver des clés pour retrouver sa patience (repenser son quotidien, son organisation par exemple) ? C'est terrible, je connais tant de gens qui ne s'arrêtent pas alors qu'ils le devraient, que ce soit pour des raisons physiques ou psychologiques, la course a la productivité, la valeur travail etc, fait vraiment du mal !
Mais bref, ce n'est pas parce que vous ne savez pas le faire que ce n'est pas faisable (agir a court terme avant pétage de plomb imminent et agir a long terme en observant avec recul ses propres agissements). Il y a des profs qui démissionnent et qui le disent clairement : je vois bien que j'ai plus la patience, plus l'envie, que c'est la corvee, que j'en ai marre d'entendre des enfants alors qu'avant j'adorais le bruit de la cour de récré. Je vais faire autre chose de ma vie. Demandez aux profs d'ESPE comment ils sont devenus profs d'ESPE
et c'est une idée ça tiens, quand on veut rester prof : commencer par essayer de changer de public !
Maintenant il y a beaucoup a dire sur PQ c'est aussi compliqué pour beaucoup de profs d'entamer ce type de réflexions et de démarches, et notamment le fait qu'avec une formation de prof, finalement, t'as rien.
Exemple d'une fille de 18 ans qui sait qu'elle veut être prof : sciences de l'éducation (licence) master MEEF 1er degré. 40 ans finalement elle pète un câble a l'idée d'aller bosser, elle veut faire autre chose. Quoi ? T'as 5 ans d'études qui te servent à rien. Les passerelles sont compliquées, même pour passer dans un autre truc public d'une catégorie inférieure. Quand t'es prof, si tu veux plus faire prof, tu dois te reconvertir en repartant de zéro puisque ta formation t'a apporté absolument que dalle sur le marché du travail.